Newsletter N°2 : Publication Réglementaire – Loi PACTE

I. CONTEXTE ET ENJEUX

 

Les articles de la Loi PACTE se posent dans un cadre spécifique : le manque de compétitivité des PME et ETI françaises. Tandis que celles-ci sont fortement créatrices d’emplois, leurs tailles peinent à croitre. Ce constat est d’autant plus vrai lorsque la comparaison est faite à l’échelle européenne : à titre d’exemple, il y a aujourd’hui deux fois plus d’ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire) en Allemagne qu’en France. Le principal enjeu de la loi PACTE réside dans la levée des principaux freins à la croissance des entreprises françaises.

 

Nombre d’ETI crées dans certains Etats européens

Source : Institut Montaigne

 

La loi PACTE prévoit également toute une série de mesures visant à introduire la notion de « raison d’être » de l’entreprise et à redéfinir la place du salarié au sein de celle-ci. Ces différentes dispositions doivent à terme permettre aux entreprises de mieux associer ses salariés à ses résultats et de prendre en considération les enjeux de la RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises).

 

CALENDRIER

 

II. LES MESURES DE LA LOI PACTE

 

A. CREATION D’ENTREPRISE

 

La loi PACTE dispose de plusieurs mesures visant à simplifier les démarches administratives liées à la création d’entreprise.

 

B. RAISON D’ETRE ET OBJET SOCIAL DE L’ENTREPRISE

 

Le législateur souhaite replacer les entreprises au cœur des préoccupations sociales et environnementales et ce dès la création de l’entreprise. Ainsi le droit intégrera les notions d’entreprise à mission, d’intérêt social et de raison d’être de l’entreprise.

  

C. GESTION QUOTIDIENNE DES PME ET ETI

 

La mise en place de certaines mesures doit permettre une gestion plus souple des PME ainsi qu’un meilleur rebond pour les entrepreneurs en procédure de liquidation judiciaire.

D. EPARGNE ET FINANCEMENT DES ENTREPRISES

Afin de mieux financer les PME, le législateur prévoit d’accroitre l’attractivité des différents produits d’épargne et d’assurance-vie.

E. INNOVATION

L’un des objectifs de la loi PACTE est de donner aux entreprises françaises les moyens d’innover et de rester compétitives à l’échelle européenne.

 

F. SALARIÉS

La loi PACTE prévoit une série de mesures visant à développer l’actionnariat dans l’entreprise et plus largement à faciliter le partage de la valeur créée.

 

III. PRINCIPAUX IMPACTS POUR LE SECTEUR BANCAIRE ET ASSURANCE

 

A. UNE OFFRE DE PRODUITS REPENSÉE

EPARGNE RETRAITE

La loi PACTE va modifier en profondeur le paysage de l’épargne retraite par une refonte des produits existants. Ainsi l’article 20 de la loi prévoit une substitution des produits d’épargne retraite actuels (contrats « articles 83 », « Madelin », PERP et PERCO) par trois nouveaux produits.

Les compagnies d’assurance et gestionnaire d’actifs doivent ainsi revoir leurs gammes de produits et plus précisément leurs caractéristiques dans la mesure où l’article 20 offre en sus aux assurés une plus grande marge de manœuvre en terme de sortie en capital/rente (libre pour les versements volontaires) et de déblocage du capital (celui-ci peut désormais être déclenché par l’épargnant en cas d’achat d’une résidence principale).

 

ASSURANCE-VIE

Les acteurs de l’assurance-vie devront également revoir leur gamme de contrats d’assurance-vie. En effet, l’article 21 de la loi Pacte impose aux assureurs d’intégrer dans leurs contrats des unités de compte labelisées ISR selon le calendrier suivant :

 

Ce même article prévoit la possibilité pour les assurés d’investir via des unités de compte dans des Fonds Professionnels Spécialisés (FPS).

 

Fonds Eurocroissance

Le fonctionnement du fonds Eurocroissance va être revu afin de le rendre plus lisible pour l’assuré. Cette simplification repose sur l’instauration d’un taux de rendement unique et une sortie en capital facilitée. Si l’attractivité escomptée par le législateur se présente, les assureurs auront alors tout intérêt à proposer ce type de contrat dans leur offre.

 

Schéma simplifié d’un rachat de contrat avant échéance

 

PEA

Les distributeurs de contrats d’épargne devront revoir leur référentiel d’actifs éligibles au PEA-PME et les conditions d’adhésion au PEA Jeunes. En effet, l’article 27 de la loi PACTE a pour objectif de booster le financement des entreprises via l’élargissement des titres éligibles au PEA-PME (titres issus du financement participatif, obligations à taux fixe et minibons) et la possibilité pour les 18-25 ans rattachés au foyer fiscal de leurs parents d’ouvrir un PEA Jeunes.

               

B. DE NOUVEAUX ACTEURS ET UNE CONCURRENCE ACCRUE

EPARGNE RETRAITE

En engageant des réformes structurantes dans le secteur de l’épargne retraite (cf. section A), le législateur souhaite amplifier la concurrence afin d’offrir aux épargnants une offre boostée assortie de frais réduits. Dans cette optique, l’article 21 prévoit que les gestionnaires d’actifs seront autorisés à commercialiser tout type de produits d’épargne retraite (jusqu’ici ils ne pouvaient proposer que des PERCO).

 

Avant la loi PACTE

Après la loi PACTE

 

Ce décloisonnement pourrait contraindre les acteurs actuels à améliorer leur offre de produits tandis que les gestionnaires d’actifs peuvent espérer des objectifs de croissance à la hausse. Il convient de noter que cette mesure pourrait avoir peu d’impacts pour les banques universelles : présentes à la fois dans le secteur de l’assurance et de l’asset management, ces dernières pourront développer davantage de synergies.

 

CHAMBRES DE COMPENSATION ET SYSTEME DE REGLEMENT-LIVRAISON

L’article 25 prévoit d’accroitre l’attractivité de la Place de Paris en assouplissant l’accès de nouvelles entités (compagnie d’assurance, OPC, FIA) aux infrastructures de marché et en rendant optionnelle l’obligation pour les chambres de compensation d’obtenir le statut d’établissement de crédit. Ces mesures pourraient inciter certaines chambres de compensation étrangères à s’installer en France.

 

CREDIT IMMOBILIER

Un amendement de l’article 71 prévoit la suppression de la clause de domiciliation bancaire présente dans les contrats de crédit immobilier. Au-delà des modifications à apporter aux futurs contrats, les banques verront leurs clients utiliser ce nouveau levier afin de faire jouer la concurrence.

 

C. UN BILAN COMPTABLE A REVOIR

Le bilan des compagnies d’assurance pourrait être fortement impacté par certains articles de la loi PACTE. En offrant aux assurés la possibilité de sortir à tout moment une partie du capital (articles 20 et 21) ou en instaurant la portabilité des produits d’épargne retraite, les compagnies d’assurance devront tenter d’anticiper dans la mesure du possible le comportement des assurés. Cela implique une revue complète de leur politique ALM (Asset and Liability Management) et de leur gestion des risques.

 

D. UNE FORMATION DES CONSEILLERS INDISPENSABLE

L’article 21 de la loi PACTE renforce l’obligation d’information et le devoir de conseil des assureurs vis-à-vis des clients. Les assureurs devront ainsi informer les clients sur les taux de rendement de l’ensemble de leurs contrats et être transparents dans les méthodes de calcul des frais et des rendements. Ces obligations associées aux nouveaux produits et titres éligibles représentent un défi de taille en matière de formation des conseillers commerciaux : ces derniers devront répondre au mieux aux nouveaux besoins des clients.

 

 

E. NECESSITÉ D’ADAPTER LES SYSTEMES D’INFORMATION

En fonction de la typologie de contrats qu’ils gèrent, les assureurs devront repenser leurs systèmes d’information afin de prendre en compte les nouveautés de la loi PACTE.

Cette refonte des systèmes d’information devra être cohérente avec la stratégie commerciale définie en amont et être mise en place courant 2019 afin d’être opérationnelle dès janvier 2020. Dès lors les banques et compagnies d’assurance doivent être en mesure d’appliquer la stratégie SI la plus efficiente en fonction de l’ampleur des développements à mettre en place (mise à jour du système existant, intégration d’un nouveau système ou outsourcing).

 

F. VERS UN CADRE JURIDIQUE POUR LES ACTIFS NUMERIQUES

Dans une volonté de faire de Paris une place incontournable en matière d’innovation et de technologie de rupture, le législateur prévoit d’établir un cadre juridique autour de l’émission d’actifs numériques (ou cryptoactifs). Pour ce faire, l’article 26 bis de la loi Pacte dispose de deux mesures.

Premièrement, les projets liés aux levées de fonds par blockchain (ICO) pourront être soumis au visa de l’AMF. Bien qu’optionnel, ce « tampon » constituera un gage de fiabilité pour les investisseurs. En contrepartie, les émetteurs d’ICO devront répondre aux exigences de l’AMF (statut juridique français, documentation exhaustive, infrastructure résiliente et respect de la LCB-FT).

 

Deuxièmement, les différents acteurs (émetteurs, plateformes d’échanges de cryptoactifs) seraient rassemblés autour du statut de Prestataire de Services sur Actifs Numériques (PSAN). Cet agrément, délivré par l’AMF, imposerait des contraintes similaires aux Prestataires de Service d’Investissement (fonds propres, contrôle interne, transparence des frais, sécurité du SI etc.) et permettrait au PSAN d’exercer de nombreuses activités :

 

Les plates-formes d’échange de cryptoactifs ainsi que les conservateurs de clefs cryptographiques ont tout intérêt à demander l’agrément PSAN si elles souhaitent se développer sur le marché français. Les banques françaises sont quant à elles déjà présentes sur le marché de la blockchain via des initiatives interbancaires. En fonction de leur capacité à allouer les fonds propres nécessaires, le cadre juridique qu’offre l’AMF représente une véritable opportunité pour le développement de nouvelles activités.

 

IV. SYNTHESE DES PRINCIPALES MESURES

CREATION D’ENTREPRISE

 

GESTION QUOTIDIENNE DES PME ET ETI

 

EPARGNE ET FINANCEMENT DES ENTREPRISES

 

INNOVATION

SALARIÉS 

RAISON D’ETRE ET OBJET SOCIAL DE L’ENTREPRISE

 

V. SOURCES

Projet de loi :

http://www.assemblee-nationale.fr/15/projets/pl1088-ei.asp

http://www.assemblee-nationale.fr/15/ta/tap0258.pdf

 

Projet de loi détaillé (dossier de presse) : https://www.economie.gouv.fr/files/files/2019/DP_PACTE_janvier_2019.pdf

 

Amendement concernant la domiciliation bancaire :

http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/1673/CSPACTE/970

 

Prestataires de services sur actifs numériques :

https://www.amf-france.org/Reglementation/Dossiers-thematiques/Fintech/Vers-un-nouveau-regime-pour-les-crypto-actifs-en-France

 

Auteur : Xavier DESNEL